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le 31/10/2016 9:55:14

L’expansionnisme néo-ottoman turc: Par Ch. Petinos, historien et écrivain

Par Charalambos Petinos, historien et écrivain

La politique néo-ottomane de la Turquie n’a jamais été aussi claire qu’aujourd’hui, deux mois après le coup d’Etat manqué contre le président turc Recep Tayyip Erdogan. Les déclarations de ce dernier clamant haut et fort que les frontières turques ne le satisfont pas, mettant en cause le Traité de Lausanne qui a fixé les frontières turques actuelles et proclamant que les intérêts de son pays vont au-delà des frontières connues sont suffisamment claires et précises. Erdogan, drapé dans les habits du défenseur de la démocratie (!!!) continue à bombarder les Kurdes de Turquie, a des vues sur la région de Mossoul, sur les îles grecques, sur le nord de la Syrie…la liste est ouverte. En même temps, il pousse pour modifier la Constitution turque et rendre le régime présidentiel, cousu à sa mesure.
Pour le moment, la situation la plus claire sur ce point est celle prévalant en Syrie. En effet, comme le précise le quotidien Le Monde dans son édition du 25 août, à l'issue d'une offensive éclair, mercredi 24 août, quelques milliers de rebelles syriens soutenus par des F16 et des chars turcs sont parvenus à prendre aux djihadistes de l'organisation Etat islamique (EI) la ville syrienne de Djarabulus, à l'ouest de l'Euphrate, non loin de la frontière turco-syrienne. Il s'agissait de « mettre un terme » à l'instabilité sur la frontière turque, de viser non seulement l'EI mais aussi les milices kurdes. « La Turquie ne tolérera aucun fait accompli en Syrie », a expliqué, le président Recep Tayyip Erdogan.
L’armée turque utilisant comme « paravent » le soutien de quelques rebelles syriens afin de donner un semblant de « légitimité » à son intervention / invasion n'a pas eu de mal à établir son contrôle sur la ville. D’autant plus que l’objectif principal claironné à hue et à dia par les Turcs et leur président autocrate est l’élimination des Kurdes des unités de protection du peuple (YPG), le bras armé du Parti de l'union démocratique (PYD), affilié au Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK, séparatiste), en guerre contre Ankara depuis 1984. Selon un officiel turc, l'opération visait à « sécuriser la frontière turque », à « aider la coalition anti-EI » ainsi qu'à « créer une zone libérée des terroristes au nord de la Syrie »(1) . En schématisant, nous pouvons affirmer que soutenue par la coalition internationale, l'incursion de l'armée turque marque un nouveau tournant dans la guerre en Syrie ; baptisée « Bouclier de l'Euphrate », elle a pour cible non seulement l'EI, mais aussi les combattants kurdes, qui sont en réalité la cible principale.
Ankara est bien décidé à empêcher la jonction des trois régions kurdes de Syrie (Afrin à l'ouest, Kobané et Djazira à l'est) que le PYD brûle de voir émerger en une seule région autonome kurde aux portes de la Turquie. Fort du soutien américain (frappes aériennes, armes, conseillers), à la pointe du combat contre l'EI, les Kurdes syriens se sont d'ores et déjà rendus maîtres d'une bande de 400 kilomètres à l'est, le long de la frontière turque, depuis l'Irak jusqu'à Kobané. Pour la Turquie, il est impensable que les 80 kilomètres restant, de Djarabulus à Afrin, puissent tomber aux mains des « cousins » du PKK (2).
Marie Jégo précise encore dans l’article cité ci-dessus : « Une chose est sûre, les Turcs ne s'arrêteront pas à Djarabulus. Leur objectif est de réaliser « la zone de sécurité » qu'ils réclament en vain à la communauté internationale depuis longtemps. Il est question que la portion de territoire allant de Marea à Djarabulus soit placée sous le contrôle de la rébellion syrienne soutenue par Ankara. Non content d'être une zone tampon entre les Kurdes d'Afrin et ceux de Kobané, l'endroit pourrait abriter les réfugiés syriens que la Turquie, terre de refuge pour 3 millions d'entre eux, n'a plus les moyens d'accueillir. Les priorités turques ont changé. Longtemps réclamé par Ankara, le départ du -tyran de Damas est devenu secondaire, l'objectif numéro un étant désormais d'empêcher à tout prix l'émergence d'une région autonome kurde le long de la frontière turque. Ce changement de stratégie a permis aux Turcs de réchauffer leurs relations avec la Russie et l'Iran, principaux soutiens du -régime de Damas. Sans leur aval, la Turquie ne se serait pas risquée à mettre un pied en Syrie. » Depuis son invasion en Syrie, la Turquie a réussi à établir un espace qu’elle contrôle, de 80 kms le long de sa frontière avec la Syrie et continue vers le sud l’élargissant davantage. L’objectif d’empêcher la jonction de deux régions kurdes syriennes est atteint et personne ne peut confirmer que la Turquie partira de cette région facilement et dans un temps prévisible.
De l’autre côté de la frontière, en Irak, la Turquie maintient plus de 2 000 soldats dans la ville de Bashiqa, située au nord-est de Mossoul et réclame sa part de la future prise de la ville de Mossoul. Erdogan rêve tout haut de reconstituer le vilayet ottoman de Mossoul, au grand dam du Gouvernement irakien.


En Turquie, chronique d’un coup d’Etat raté
Le coup d’Etat du 15 juillet, mal préparé et mal exécuté a donné l’occasion à Erdogan de justifier et d’intensifier ses coups contre la laïcité et les Kurdes. D’après certaines rumeurs il aurait qualifié lui-même le coup d’Etat de « pain béni » justifiant et légitimant la répression qui vise à mettre au pas la société turque et surtout la frange laïque et démocrate du pays (3).
Quelques faits et dates
* Le coup d’Etat a permis à Erdogan d’asseoir un peu plus son emprise sur les institutions et la société turques. Il a lui-même qualifié le coup d’Etat de « pain béni » car cela lui fournissait le prétexte idéal d’en finir avec les gulénnistes et la laïcité.
* Les purges ont été drastiques :
- Un tiers des 358 généraux turcs ont été arrêtés ou font l’objet d’une enquête.
- Une semaine après le coup d’Etat manqué, plus de 20 000 professeurs ont été chassés de leur emploi, à commencer par 1 250 doyens de faculté.
– Plus de 100 000 Turcs arrêtés, gardés à vue ou limogés avec une libération massive des prisons des condamnés de droit commun pour libérer des places pour les opposants
- Poursuite des condamnations des journalistes et fermeture massive d’organes de Presse réputés proches de l’opposition, dont le quotidien kurde Özgür Gündem.
- Au fur et à mesure les purges s’étendent vers tous les secteurs clés : magistrats, universitaires, journalistes, policiers, militaires.
- La menace de réintroduction de la peine de mort est brandie, au grand dam des Européens, bien silencieux par ailleurs, terrassés par la crainte de voir l’accord sur les migrants tomber à l’eau…
- Recep Tayyip Erdogan a désormais toute latitude pour mettre à exécution son projet de refonte civilisationnelle. Sa priorité est de « fermer la parenthèse du kémalisme », expression en vogue dans les rangs de l’AKP. Il veut débarrasser le pays des repères imposés après l’effondrement de l’Empire ottoman, notamment la laïcité. Erdogan et ses compagnons de route sont prêts à mourir pour leur cause : « Cela fait longtemps que nous avons revêtu nos linceuls », ont-ils coutume de répéter. La proclamation de la « République islamique de Turquie » n’est peut-être pas pour demain mais une nouvelle ère a commencé (4).


1 Le Monde du 25 août 2016.
2 Idem
3 Voir à ce sujet l’article de Caroline Fourest « Vers un califat turc », dans Marianne du 16 septembre 2016.
4 Idem.

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