MONTPELLIER Kermasti ou vaincre l’oubli, conférence le 1er décembre 2006.

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KERMASTI OU VAINCRE L’OUBLI.
Article écrit par Monsieur Alain JUNY

La grande salle de la Maison des Relations Internationales avait fait le plein de Grecs et de leurs amis pour assister à la projection du film d’Alexandre Joannides : Kermasti ou vaincre l’oubli le 1ier Décembre dernier. En l’absence de Madame le Maire et de la Directrice de la Maison des Relations Internationales excusées, il revint à Mr Le Consul Général de Grèce de présider la séance.
Petit fils d’exilés grecs d’Asie Mineure en 1922 le réalisateur a voulu connaître les raisons des silences de son grand-père, le pourquoi des non-dits qu’il garda jusqu’à son dernier jour enfouis au fond de lui-même et pourtant quotidiennement présents au point d’interpeller son petit fils. Le film à travers les différentes étapes d’un itinéraire intérieur qui est une libération pour le réalisateur reconstitue donc l’histoire de sa famille depuis le début du XXième siècle. L’enquête minutieuse d’Alexandre Joannides établit que son arrière grand-père a été tué par les Turcs en 1922, ce qui a conduit son grand-père et son grand-oncle à être placés dans un orphelinat avant de partir pour la Grèce, Alexandrie et la France. Le grand-oncle Dimitri, lui, avait été perdu dans les hôpitaux athéniens lors de l’épidémie de fièvre typhoïde qui fut une des épreuves rencontrées par les exilés à leur arrivée dans la mère patrie. Il fut retrouvé trente ans après dans la joie que l’on devine ! A. Joannides et son père qui l’accompagne dans cette recherche évoquent également cet aïeul maternel tué lui aussi par les Turcs. Ces événements tragiques sont sans doute à la base des silences du grand-père et de cette joie qu’il avait d’imiter la sirène des navires … peut-être ceux de l’exil.
Les interventions de Joëlle Dalègre (1) apportent au récit un éclairage scientifique et historique qui inscrit ces destinées individuelles dans la trame de l’Histoire.
Le film, accompagné de musiques évocatrices, offre des images fortes comme celles des retrouvailles avec la famille restée à Athènes, celles aussi de la découverte de l’emplacement de la boulangerie familiale à Kermasti, celles enfin du recueillement sur les lieux où se situait le cimetière des Grecs. Mais les images les plus émouvantes sont celles de la visite de l’orphelinat où les pièces restées pratiquement intactes permettent de revivre ce qu’ont vécu et enduré les membres de la famille et beaucoup d’autres.
Ainsi Kermasti relatant l’aventure personnelle d’Alexandre Joannides et de son père rejoint l’histoire de ces milliers de grecs qui ont connu la mort, l’exil et la détresse. Ce film constitue un indéniable document historique et atteint bien le but que s’était fixé le réalisateur « Vaincre l’oubli ». La qualité des échanges et l’émotion qui suivirent la projection le prouvent bien.


(1) J. Dalègre est l’auteur de : Grecs et Ottomans, 1453-1923, de la chute de Constantinople à la disparition de l’Empire Ottoman.